Les Compagnies d’assurance exigent, en cas de vol, la preuve de l’appartenance, de l’existence et de la valeur des biens dérobés, parfois même de l’ancienneté, l’état, par tous les moyens en votre possession. Quels sont les documents à conserver ou réclamer à nouveau notamment pour les objets précieux dans un but préventif ?
Il faut savoir que le fondement repose sur l’article 1353 du Code Civil précisant que « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »
En cas de vol, il appartient donc à l’assuré d’ apporter la preuve que les objets dérobés lui appartenaient, ce qui est logique quand on y pense mais en pratique, difficile de réunir tous les documents ce qui entraine certains à tenter d’en fabriquer a posteriori …
On admet un délai de deux jours ouvrés pour déclarer le vol ,dès qu’on en a eu connaissance, auprès de son assureur et après avoir porté plainte auprès des services de police en vertu de l’article L113-2 du code des assurances.
Rappel du principe indemnitaire
La valeur des biens volés s’établit au jour du sinistre dans le cadre amiable du réglement de sinistre avec son assureur.
Selon l’article L121-1 du code des assurances, « l’indemnité due par l’assureur à l’assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre » autrement dit l’indemnité ne doit pas être une source d’enrichissement sans cause et correspond à la valeur du bien dérobé ni plus ni moins.
(Attention, L’option « valeur à neuf » ne correspond pas à un prix d’achat comme je l’avais expliqué dans mon précédent article.)
Soumis à des audits internes réguliers, les inspecteurs de compagnies rappellent les écarts d’appréciation par rapport à leur règles d’application internes.
L’Expert doit composer entre le traumatisme affectif vécu par l’assuré, victime d’un vol de ses biens les plus chers, et, désireux d’être indemnisé rapidement à hauteur de ses espérances, et la « note interne » de la compagnie d’assurance en jeu. Parfois difficile d’expliquer qu’aucune indemnisation ne sera versée en raison de l’absence de justificatifs probants ou que l’assuré n’a pas respecté les obligations de prévention écrites dans son contrat d’assurance (que peu d’entre nous lisent en détail il faut bien le reconnaitre, y compris chez des personnes bien informées mais négligentes sur ce point).
Aussi, pour mieux anticiper ces situations embarrassantes, je vous propose de faire un rapide tour d’horizon des documents à ranger en lieu sûr (faites des copies si vous les conservez au coffre qui pourrait aussi être dérobé) en cas de besoin.
Quels sont les documents permettant d’apporter la preuve de la valeur des biens dérobés ?
Facture d’achat ou attestation de vente d’un professionnel
L’Expert doit donc proposer une indemnité correspondant à la valeur du bien au jour du sinistre selon la description précise de ce dernier figurant normalement sur la facture d’achat. Je précise « normalement » car dans la pratique on note que la description est tronquée ou remplacée par une référence propre à la boutique et incompréhensible. Difficile, bien des années après l’achat, de retrouver des informations complémentaires.
Pourtant, selon la réglementation en vigueur, toutes les mentions générales obligatoires doivent y figurer à commencer par la précision du modèle vendu et le moyen de paiement au delà de 1000 euros depuis le décret d’octobre 2015.
En l’absence de toutes les caractéristiques, l’Expert ne peut trouver une valeur exacte; cette situation que je qualifie de « fréquente », est source de conflit lors de la présentation de la proposition d’indemnisation.
En effet, les marques connues, allant des accessoires de luxe en passant par l’outillage, produisent désormais des séries d’un même modèle, modifié année après année, dans toutes ses composantes, évoluant la plupart du temps avec la technologies pour ce qui concerne les matériels informatiques.
Parfois en totalité comme me l’expliquait un responsable d’un magasin connu spécialisé dans la vente de vélo, des nouveaux matériaux ont été introduits comme le carbone et toute la mécanique des roues et du pédalier a été revue; le modèle 2010 n’a rien à voir avec celui de 2018 et pourtant il porte toujours le même nom commercial !
Chaque année, le nouveau millésime introduit de nouvelles fonctions qui ne peuvent être retenues sous peine de ne pas respecter le principe indemnitaire.
En conséquence, le prix varie et pour illustrer le propos rapidement, réclamer le remplacement d’une montre de marque ROLEX sans indiquer la référence, l’année précise du modèle acheté, voir du type de bracelet ou autres accessoire (diamant) ne suffit pas, tant les écarts de prix sont importants.
La référence précise du modèle figurant sur la facture nous permettra de retrouver son prix, à défaut l’Expert devra se baser sur le modèle le moins cher car il appartient à l’assuré d’apporter la preuve de l’existence du bien comme nous l’avons indiqué plus haut.
Deux cas de figure peuvent se présenter:
- soit l’article référencé est toujours en vente au jour du sinistre, le dernier prix public du catalogue sert de référence.
- Soit le même article n’est plus commercialisé, il faut alors baser l’estimation sur un modèle « similaire », c’est à dire de nature et caractéristique identique … ce qui n’est pas toujours facile tant l’évolution des biens manufacturés ont évolué ces dernières années !
Estimation ou expertise préalable d’un professionnel réalisée avant sinistre
Trop souvent, l’estimation préalable est repoussée par les assurés qui considèrent qu’ils n’en n’ont pas besoin. Sauf que le jour où il faudra produire des preuves …. on se rend compte que les documents qui avaient été bien conservés un certain temps, restent introuvables ou incomplets.
Pour ceux qui avaient demandé les services d’un commissaire priseur, l’inventaire détaillé permet de retrouver les prix pour des objets équivalents. Parfois, un expert spécialisé est nécessaire pour détailler l’époque, le style, l’authenticité car trop nombreuses affaires de faux circulent.
En revanche, l’inventaire notarié ou ceux réalisés par les bijoutiers restent plutôt sur une description générique (absence de poids pour les bijoux, identification des métaux ou d’autres points précis permettant d’identifier l’objet), là encore ce type de document peut être une source de confusion pour l’exploitation de ces données dans le cadre d’une réclamation à la compagnie d’assurance.
La photographie vient souvent en complément d’un inventaire détaillé établi par un Expert qui engage sa responsabilité en indiquant clairement son nom et sa qualité, a minima.
Les documents apportant un élément de la preuve de la valeur des biens volés
Certificat de garantie / d’authenticité
Les caractéristiques sont généralement biens mentionnées sur ce type de document; il manque le prix et/ou le nom de l’acheteur. Les biens justifiés par un certificat de garantie ou d’authenticité peuvent être classés en catégorie « preuve d’existence » seulement.
Avec ce document, vous pouvez demander un devis de remplacement à l’identique ou d’un modèle similaire au fournisseur.
Ticket de caisse
Les informations figurant sur le ticket de caisse sont parfois proches de la facture, dans d’autres cas, en l’absence d’identification du produit ou de l’acheteur, il convient de joindre par exemple une photographie prise en situation de la vie courante pour attester de l’appartenance de l’objet disparu. Difficile de croire que tous les objets figurants sur le ticket de caisse ont été volés le même jour …. là encore, la réclamation doit correspondre aux biens déclarés volés sur le dépot de plainte. Certains ont tendance à fournir un paquet de tickets de caisse trop important.
Cas particulier des photographies
Les photographies seules ne peuvent être retenues comme une preuve de la valeur du bien; chacun comprend que la reproduction de l’objet sur une feuille ne peut certifier de la qualité de ce dernier (or ou plaqué or, diamant ou verre incolore ?).
Prises en plan rapproché, les photographies des bijoux ou autre objets mobiliers ne peuvent être une preuve de l’appartenance. Je peux aussi bien photographier la vitrine de mon bijoutier !
A contrario, en situation de la vie courante, la photographie ne permet pas de voir l’objet dans sa totalité. « Si, Regardez ma bague sur ma main posée sur l’épaule de la mariée …. »
En bref, l’estimation des bijoux justifiés par photographies sont soumis à des règles différentes selon les compagnies d’assurance et Mutuelle.
Les emballages, les témoignages, les relevés bancaires et autres documents type bon de livraison ne sont pas considérés comme des éléments incontestables de preuves d’existence, d’appartenance et de valeur de l’objet lors d’un vol. L’appréciation varie selon les Compagnie d’assurance et les cas particuliers.